Amours de Marie

LXIII

 

— Que dis-tu, que fais-tu, pensive tourterelle,

Dessus cet arbre sec ? — Las ! passant, je lamente.

— Pourquoi lamentes-tu ? — Pour ma compagne absente,

Dont je meurs de douleur. — En quelle part est-elle ?

— Un cruel oiseleur, par glueuse cautelle,

L’a prise et l’a tuée, et nuit et jour je chante

Ses obsèques ici, nommant la mort méchante

Qu’elle ne m’a tuée avecques ma fidèle.

— Voudrais-tu bien mourir et suivre ta compagne ?

— Aussi bien je languis en ce bois ténébreux,

Où toujours le regret de sa mort m’accompagne.

— Ô gentils oiselets, que vous êtes heureux !

Nature d’elle-même à l’amour vous enseigne,

Qui vivez et mourez, fidèles amoureux.

Référence bibliographique

Ronsard, Pierre de, « Amours de Marie, LXIII », Amours de Marie, Sonnets pour Hélène, Paris, Imprimerie nationale, 1985 [1555].

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